Amandine DABAT
L’EMPEREUR d’ANNAM HAM NGHI – dit « Prince d’Annam », 春子 « Tử Xuân », PEINTRE ET SCULPTEUR (1871-1944)

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Hàm Nghi, Autoportrait, 1896. Mine de plomb sur papier –  Collection particulière © musée AAA – photo Christophe Darbelet  © archives de l’expert (détail)

L’EMPEREUR d’ANNAM HAM NGHI – dit « Prince d’Annam », 春子 « Tử Xuân », PEINTRE ET SCULPTEUR (1871-1944)

 

L’expert

Amandine Dabat est l’arrière-arrière-petite fille de l’empereur vietnamien Hàm Nghi. Docteure en histoire de l’art, diplômée de l’université Paris-Sorbonne (Paris IV), elle a lui consacré sa thèse, intitulée « Hàm Nghi (1871-1944), empereur en exil, artiste à Alger », soutenue en 2015 et publiée en 2019 aux Presses de Sorbonne Université.

Cette thèse de doctorat s’appuie sur la découverte exceptionnelle des archives privées de Hàm Nghi (2 500 lettres et brouillons de lettres). Amandine Dabat est également titulaire d’un Master en études vietnamiennes de l’Université Paris-Diderot – Paris VII (2014). Elle est membre du Centre de Recherche sur l’Extrême-Orient de Paris-Sorbonne.

Amandine Dabat a été commissaire de deux expositions consacrées à l’œuvre de l’empereur Hàm Nghi :

  • L’art en exil – Hàm Nghi, Prince d’Annam (1871-1944), Musée des Arts asiatiques, Nice (2022).
  • L’art en exil – Hàm Nghi, Prince d’Annam (1871-1944), Musée des Arts d’Afrique et d’Asie, Vichy (2024).

Depuis sa thèse de doctorat, Amandine Dabat prépare le catalogue raisonné de l’œuvre de l’empereur Hàm Nghi, un travail toujours en cours.

Amandine Dabat est lauréate de plusieurs prix pour ses recherches sur l’empereur Hàm Nghi :

  • Prix William Shorrock, Société d’Histoire coloniale française (2014)
  • Prix de la Fondation Flora Blanchon de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres (2017)
  • Prix Jeune talent de l’Association d’Amitié franco-vietnamienne (2018)
  • Prix de soutien à la création littéraire de la Fondation Simone et Cino Del Duca – Institut de France, sur proposition de l’Académie française (2020).

Forte de la connaissance précise de l’œuvre et de la vie de Hàm Nghi, Amandine Dabat expertise régulièrement ses peintures, sculptures et pastels. Ses méthodes s’appuient sur un examen stylistique et technique de l’œuvre, ainsi que sur des recherches documentaires dans les archives privées de l’artiste, afin d’expliquer le contexte, d’attester du cadre dans lequel les œuvres ont été réalisées et de les situer.

L’artiste

L’empereur Hàm Nghi est né au Vietnam en 1871. Il est intronisé empereur en 1884 dans le contexte de la colonisation française de l’Indochine. Après un an de règne, ses régents provoquent la bataille de Huế, mais les Français prennent le dessus. Le régent Tôn Thất Thuyết (1839-1913) part dans les montagnes du centre de l’Annam avec l’empereur pour former un mouvement de résistance contre les colonisateurs. Le nom de Hàm Nghi devient le symbole de la résistance contre les Français. Après trois ans de lutte, en octobre 1888, l’empereur est trahi, capturé et livré aux Français, qui décident de l’exiler en Algérie.

Hàm Nghi débarque à Alger en janvier 1889. Il est destitué et son nom d’empereur ne doit plus être utilisé pour le désigner. Les autorités françaises lui attribuent alors le titre et le nom de « Prince d’Annam », faisant fi de son état civil (Nguyễn Phúc Ưng Lịch).

Hàm Nghi est installé à El Biar, dans une villa néo-mauresque sur les hauteurs d’Alger. Après quelques mois d’exil, il commence à prendre des cours de peinture et de dessin avec le peintre orientaliste Marius Reynaud (1860-1935). Hàm Nghi se met à travailler la peinture et le dessin chaque jour. S’il est alors, aux yeux des autorités le « Prince d’Annam », il continue à se faire appeler Tử Xuân par ses intimes, surnom qui devient son nom d’artiste.

À partir de 1893, Hàm Nghi voyage environ tous les deux ans en France pour des raisons de santé. Il séjourne surtout à Vichy et à Paris où il rencontre des artistes de son époque, tout en se familiarisant avec les styles et techniques des maîtres qui l’ont précédé.

Le sujet principal de ses tableaux est la nature. Sa spécificité est sa recherche constante de la lumière, des effets de contre-jour. Rien de spécifiquement vietnamien ne transparaît dans son œuvre, rappelant la peinture de paysage française de la deuxième moitié du XIXe siècle.

L’été 1899, à Paris, Hàm Nghi rencontre Auguste Rodin (1840-1917) qui l’initie à la sculpture. L’influence de Rodin est très importante dans son œuvre. L’année suivante, le prince rencontre la poétesse Judith Gautier (1845-1917), fille de Théophile. À la même époque, il se lie d’amitié avec le sculpteur Pierre Roche (1855-1922), né Pierre Massignon, et son fils, le futur islamologue Louis Massignon (1883-1962). Il rencontre également le peintre Henry Valensi (1883-1960).

L’année 1903, au cours de laquelle plusieurs expositions furent consacrées à Paul Gauguin (1848-1903), constitue un tournant majeur dans la peinture de Hàm Nghi. À partir de cette date, il délaisse une approche assez académique du paysage et fait entrer dans sa palette les couleurs de Gauguin, les cernes bleus et les aplats des Nabis. Il s’intéresse aussi au travail des impressionnistes, dont il emprunte l’utilisation de la touche et la production de séries de toiles peintes dans un même lieu.

En juin 1904, le prince d’Annam expose une dizaine de pastels dans la rotonde du musée Guimet. En 1909, Hàm Nghi participe à une exposition collective à la Galerie Devambez, boulevard Malesherbes à Paris. Il y expose ses dessins sous le nom de « prince d’Annam », aux côtés de sculptures de Judith Gautier, de peintures de Théophile Gautier et de Sacha Guitry.

La sculpture devient l’art majeur de Hàm Nghi à partir des années 1920. Il façonne des figures féminines, des bustes masculins et féminins en terre et réalise lui-même ses plâtres. Il fait couler quelques bronzes à Paris à l’occasion de son exposition de 1926 (peintures, pastels et sculptures) à la galerie Mantelet-Colette Weil à Paris.

Hàm Nghi tenta de maintenir son activité artistique dans sa sphère privée, consentant exceptionnellement à exposer ses œuvres lors de rares expositions organisées par des amis. Prisonnier politique, Hàm Nghi trouva sa liberté à travers l’art. Sa discrétion tout au long de son exil vis-à-vis de son art, entretenue ensuite par ses descendants, n’a pas permis la connaissance ni la diffusion de son œuvre avant ces dernières années. Hàm Nghi, empereur patriote, héros national au Vietnam, est désormais reconnu comme étant le premier artiste moderne vietnamien formé par des peintres et sculpteurs français.

Bibliographie

Ouvrage de référence :

Amandine Dabat, Hàm Nghi. Empereur en exil, artiste à Alger, Paris, Sorbonne Université Presses, collection « Asie », 2019.

Catalogue d’exposition :

Amandine Dabat, Adrien Bossard (dir.), Hàm Nghi, Prince d’Annam (1871-1944) L’art en exil, Catalogue d’exposition, Nice, Musée des arts asiatiques, 19 mars – 28 août 2022, Milan, Silvana editoriale, 2022.

Articles et chapitres d’ouvrages publiés :

Amandine Dabat, « Le prince d’Annam (1871-1944). Un Vietnamien orientaliste en Algérie française ? », Histoire de l’Art, n° 82, 2018/1, p. 141-152.

Amandine Dabat, « De l’Empereur Hàm Nghi au Prince d’Annam. Une figure de l’exil », dans Dominique Barjot, Jean-François Klein (dir.), De l’Indochine coloniale au Việt Nam actuel. Premiers entretiens d’Outre-Mer, Paris, Académie des Sciences d’Outre-Mer – Magellan & Cie, 2017, p. 181-192.

Amandine Dabat, « L’exil politique de l’empereur Hàm Nghi à Alger », dans Alain Ruscio (dir.), Une vie pour le Vietnam. Mélanges en l’honneur de Charles Fourniau, Paris, Indes Savantes, 2016, p. 161-183.

Amandine Dabat, « L’empereur Hàm Nghi (1871-1944) : l’univers d’un artiste », dans Caroline Herbelin, Béatrice Wisniewski, Françoise Dalex (dir.), Arts du Vietnam, nouvelles approches, Actes du colloque international (CREOPS – Université Paris-Sorbonne), 4-6 septembre 2014, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2015, p. 105-112.

Amandine Dabat, « Métaphores et identité culturelle. Un empereur vietnamien en exil, Hàm Nghi (1871-1944), artiste à Alger », dans Véronique Alexandre-Journeau (dir.), Métaphores et cultures. En mots et en images, Paris, L’Harmattan, coll. L’univers esthétique, 2012, p. 269-280

Amandine Dabat, « Vua Hàm Nghi : người nghệ sĩ hội họa và điêu khắc [Le roi Hàm Nghi : artiste peintre et sculpteur] », Xưa & Nay n° 377, Hanoi, avril 2011, p. 6-8 et 35.

Amandine Dabat, « Vua Hàm Nghi : người nghệ sĩ hội họa và điêu khắc », Nghiên cứu và Phát triển n° 3 (86), Huế, 2011, p. 102-111.

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Amandine DABAT

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